J’ai fait deux ateliers d’écriture sur deux vendredis, au lycée professionnel Tony Garnier de Bron (69). Ce que j’aime dans cet exercice, c’est de montrer que tout le monde est capable d’écrire une histoire, car cela fait appel à notre imaginaire, outil universel. Les élèves de ces classes ne sont en général pas de gros lecteurs et ils arrivent avec méfiance. A partir d’une image, ils ont la journée pour imaginer et écrire une histoire, suivant un canevas en six étapes. Au début, ils tâtonnent, posent des questions scolaires : « ai-je le droit d’écrire ci ? d’inventer le nom d’une ville ? » et quand ils comprennent qu’il n’y a pas vraiment de règle, qu’ils n’ont qu’à laisser parler leur imagination, ils sont à fond…

Certains ont du mal à démarrer. Je leur dis « Regarde cette photo, ça te fait penser à quoi ? » Ils ont plein d’idées. OK. « Alors, comment raconterais-tu cette histoire à ton petit frère, ou ta petite soeur ?, là, comme ça, en parlant ? » Ils racontent, très à l’aise, leur histoire. « Et bien tu vois, tu n’as qu’à écrire ce que tu viens de dire, pour le style, on verra après ». Car ce qui compte, c’est l’histoire, leur projection, leur travail unique, leur création. Les textes sont forcément bons, originaux, amusants, parfois tristes ; on leur dit, et ces élèves, qui n’ont malheureusement pas toujours été encensés dans leurs études apprécient ces compliments mérités. Ils prennent confiance en eux, certains rédigent six, sept pages. D’autres ne prennent pas leur récré, une souhaite lire son texte à toute la classe. Un autre, très fier, demande que son prof relise chaque nouveau paragraphe.

À un moment, c’est le calme absolu. Une douzaine de gamins écrivent en silence au CDI. Je n’entends que le cliquetis des claviers. Nous nous regardons avec Gaëlle, la prof de Français et Laurence, la documentaliste. Je lance à la cantonade « vous êtes toujours aussi sage ? Mais de quoi se plaignent vos professeurs ? » Aussitôt, c’est un déclenchement de rires. « Ouais, M’sieur, on est toujours aussi tranquilles ! », « Non, M’sieur, mais là on kiffe notre texte… ».

Merci à Laurence L. et à Gaelle C. pour avoir pensé à ce projet et pour l’avoir mené jusqu’au bout, malgré les difficultés actuelles. Le genre de journée qui fait grandir tout le monde.